[mp3 | wav | paroles]
Vous souvient-il de nous petites alors ?
Les photos nous montrent heureuses au dehors.
Dissimulant, en creux, une sourde absence,
Quelque brume étrange dans nos yeux immenses.
Des clichés qu’il reste, je chéris surtout
Celui pris au jardin nous trois debout.
Tu soutiens ma tête, elle regarde ailleurs.
Des années après, il étreint mon cœur.
Vous souvient-t-il de nous plus grandes après ?
Bavardages incessants, rires et hoquets
Peuplaient la maison, coloraient les murs
Tout bruissants de secrets et de murmures.
Je me souviens aussi des dimanches soirs,
Une peine insidieuse, un furieux cafard
Nous suffoquaient toutes, mais nous laissaient seules
Face à la tristesse, à la vie, au deuil.
Je repense à nous, quand les années mortes m’assaillent, quand lasse et à genoux,
Face aux souvenirs, l’inventaire vaudrait-il le coup ?
J’y ai renoncé souvent.
Oublier l’enfance, je voudrais parfois redevenir vierge de souvenirs, ne pas Évoquer sans cesse, nos souvenirs ensemble, les vacances passées, la prairie, les trembles.
Faire le deuil enfin des rires et des chants, plein champ, contrechamp
Sur d’autres histoires, de vieilles histoires.
Oublier l’enfance, je voudrais parfois redevenir vierge.
Construire une autre vie qui enfin soit mienne,
Me ressemble et me tienne, loin des histoires, des vieilles histoires.
Je suis née dans l’air palpitant d’un soir d’été.
La vie m’a touchée.
J’ai gardé, malgré tout, au fond d’un tiroir, un tiré à part de notre histoire.